Music From Do The Right Thing


.CRITIQUE/

En ce début d’été, voici une B.O. qui résonne avec la chaleur estivale et l’actualité de notre pays. Spyke Lee depeint la micro-société d’un quartier populaire de New-York et fait de ce film et de sa bande son, une photographie de la fin des années 80 dans une amérique en proie avec ses contradictions.

Le premier morceau intronise le film avec une boxeuse dansant sur le superbe « Fight the power » du génial Public Ennemy. La musique reste un axe central de ce film entre le DJ joué par Samuel Lee Jackson ou Radio Raheem qui transporte son énorme poste radio en écoutant du rap toute la journée.

Al Jarreau, Steel Pulse, Ruben Blades, Public Ennemy, Take 6, Teddy Riley forment une bande originale variée des multiples facettes d’une musique afro-américaine qui n’a plus rien à prouver.

Entre rire et tragédie, cette histoire depeint une société en conflit avec ses démons en toile de fond : l’injustice et le racisme. Ocollus

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Il existe une courte liste de films qui ont permis de saisir la réalité de l’oppression, de l’adversité et du traumatisme qui découlent du fait d’être noir en Amérique, et Do The Right Thing en fait assurément partie. Réalisé par Spike Lee et sorti en 1989, le film – qui faisait suite aux deux premiers efforts de Lee, She’s Gotta Have It et School Daze – mettait en scène Lee lui-même dans le rôle de Mookie, un livreur pour une pizzeria locale dans le quartier Bed Stuy de Brooklyn.

Inspiré par un épisode de la série Alfred Hitchcock Presents, qui contenait une théorie établissant une corrélation entre la hausse des températures et l’augmentation du nombre de meurtres, Lee aurait écrit le scénario – initialement intitulé Heatwave – en l’espace de deux semaines. Au cours d’une journée d’été caniculaire, les déplacements de Mookie nous font rencontrer un certain nombre d’habitants du quartier, qui nous entraînent ensuite dans leurs propres voyages et escapades dans le quartier.

Abordant un certain nombre de sujets sociopolitiques, Do The Right Thing commence comme un film léger et bienveillant, mais se transforme progressivement en un référendum sur les relations raciales et les frictions entre les forces de l’ordre et les communautés qu’elles ont juré de servir et de protéger. La décision de Lee de se concentrer sur ces dynamiques a été motivée par un incident racial survenu en 1986 à Howard Beach, où un homme noir a été tué après avoir été poursuivi sur une autoroute par une foule de jeunes blancs, ainsi que par le meurtre d’Eleanor Bumpurs en 1984 par des policiers de la ville de New York.

Avec un casting de stars talentueuses comprenant Giancarlo Esposito, Samuel L. Jackson, Martin Lawrence, Rosie Perez, Robin Harris, John Turturro, Ossie Davis, Ruby Dee, Bill Nunn, Frankie Faison et Danny Aiello, Do The Right Thing a été salué comme l’un des films les plus importants et les plus influents de la génération hip-hop et de l’histoire du cinéma.

Alors que 30 ans se sont écoulés depuis la sortie en salle de ce film phare, VIBE met en lumière dix leçons tirées de Do The Right Thing, qui continuent de refléter et d’influencer la société trois décennies plus tard.

1. La prévalence de la culture des baskets
Un personnage attachant de Do The Right Thing qui a conquis les cœurs est Buggin’ Out (Giancarlo Esposito), un B-Boy de Brooklyn et un quasi-activiste qui a une affinité pour les chaussures de sport de type Air Jordan. L’un des moments mémorables où Buggin’ Out a eu raison de le faire a été la fameuse rencontre avec un cycliste caucasien qui l’a heurté sur le trottoir, l’obligeant à érafler sa toute nouvelle paire de Jordan 4. Le cycliste, qui portait ironiquement un t-shirt Larry Bird dans la scène, attire l’ire de Buggin’ Out et de son équipe de Stuyvesant Avenue, qui le contrarient tout en provoquant une situation houleuse. Cet épisode du film est un reflet direct des rues de Brooklyn et d’ailleurs à l’époque, où le fait d’endommager une nouvelle paire de baskets pouvait conduire à une bastonnade, voire pire. Si les temps ont changé et que la violence entourant la culture des baskets s’est dissipée, notre amour pour une nouvelle paire de chaussures par une chaude journée d’été, lui, n’a certainement pas changé.

2. L’arrivée de la gentrification
La prévision de Spike Lee concernant l’embourgeoisement qui allait engloutir le quartier de Brooklyn a été timidement transmise lors du face-à-face entre Buggin’ Out et le colonisateur présumé, qui semble être un nouveau venu dans le quartier. Contrairement à Bed Stuy aujourd’hui, où l’on voit des gens de différentes races déambuler dans les rues, le quartier était majoritairement noir et latin dans les années 80, et les rares apparitions d’un Caucasien donnaient aux habitants des raisons de s’inquiéter. Alors que l’étranger anonyme affirme que Brooklyn est son lieu de naissance, son air de droit et son mépris pour les résidents de longue date reflètent le dialogue et les luttes de pouvoir liés à l’embourgeoisement d’aujourd’hui.

3. La dichotomie du sport, du divertissement et de la race
Les opinions racistes et stéréotypées de Pino (John Turturro) sur les Afro-Américains sont mises en évidence tout au long de Do The Right Thing, mais se révèlent à moitié fondées lors d’un échange avec Mookie. Tout en reconnaissant que tous ses athlètes et artistes préférés sont noirs, Pino sépare son admiration pour leurs talents de son dédain pour les Afro-Américains, un sentiment qui a été examiné dans le documentaire Shut Up and Dribble produit par LeBron James en 2018.

4. La vérité sur les stéréotypes raciaux
Les antagonistes raciaux de Do The Right Thing sont peut-être d’origine caucasienne et italo-américaine, mais le film se concentre également sur les stéréotypes universels que de nombreuses races et groupes ethniques ont les uns envers les autres. Une partie du film examine cette dynamique, alors que divers personnages d’origines différentes crachent une litanie d’insultes raciales et ethniques devant la caméra avec aplomb. Mister Senor Love Daddy (Samuel L. Jackson) se détache de la folie pour insister sur le fait que le sang-froid doit prévaloir, mais le sentiment que les préjugés, les stéréotypes et les insultes, aussi minuscules soient-ils, sont répandus dans tous les domaines.

5. Le pouvoir de l’amour et de la haine
Le thème de l’amour et de la haine est mis en contexte par Radio Raheem (Bill Nunn), le boutefeu du quartier à l’aura cordiale mais imposante. Arborant une paire de bagues plaquées or à quatre doigts, avant de filer chez Sal’s Pizza pour se faire servir une part, Raheem raconte l’histoire de « Left Hand, Right Hand » pour illustrer l’équilibre de la vie, dans laquelle l’amour et la haine sont en constante lutte de pouvoir. La morale de l’histoire est que l’amour triomphe de tout et qu’il est le fil conducteur qui relie les Noirs de Brooklyn et le monde entier.

6. Le pouvoir du système florissant
L’une des constantes de Do The Right Thing est la présence de « Fight The Power », la contribution de Public Enemy à la bande originale et la chanson thème du film. Outre cet hymne qui annonce le dénouement tragique du film, cette chanson est aussi un microcosme de l’importance du « booming system » dans les communautés urbaines. Dans les années 80, le boombox était essentiel pour créer l’ambiance du quartier, en particulier l’été, lorsque les chansons et les sons sortant des haut-parleurs constituaient la bande-son de la saison. Bien que l’évolution de la technologie ait entraîné le remplacement du boombox par des haut-parleurs portables et des smartphones, le son de la musique émanant d’innombrables avenues et boulevards est la preuve que le ghetto blaster de Radio Raheem continue de vivre, dans l’esprit.

7. Le drame d’une vague de chaleur
Se déroulant pendant la journée la plus chaude de l’été à New York, Do The Right Thing capture l’expérience de braver une vague de chaleur, ce qui n’est pas pour les âmes sensibles. Des bouches d’incendie ouvertes, des linges froids, des glaçons et d’autres agents rafraîchissants sont utilisés pour atténuer l’humidité étouffante et créer des moments de joie, mais ils ne font pas le poids face aux rayons du soleil qui s’abattent sur Bed Stuy. Cela se manifeste par des colères courtes, qui s’enflamment tout au long du film dans un certain nombre de cas et à différents niveaux.

8. La persévérance est la clé
Les thèmes sociopolitiques primordiaux du film alimentent la conversation autour de celui-ci, mais les romances sous-jacentes entre les personnages clés de Do The Right Thing ajoutent à la richesse de sa trame. Mookie, qui vit une relation chaude et froide avec la mère de son enfant, Tina (Rosie Perez), semble reléguer ses responsabilités de père au second plan alors qu’il tente de remettre sa vie et sa situation financière sur les rails. Cependant, l’amour entre les deux est évident, car ils jouent au jeu du chat et de la souris avec des glaçons, ce qui a inspiré un texte de rap à Kanye West. Par ailleurs, Ossie Davis (Da Mayor) et Ruby Dee (Mother Sister), un couple de la vie réelle, commencent le film aux antipodes l’un de l’autre, mais finissent par se rapprocher. Ces deux scénarios nous rappellent que la persévérance est essentielle lorsqu’il s’agit de faire la cour à l’autre potentiel.

9. L’intensité de la rage noire
Le point central de ce classique de Spike Lee est sans aucun doute l’affrontement à la pizzeria Sal’s, qui découle de la protestation de Buggin’ Out pour que des photos d’artistes noirs soient placées sur le mur des célébrités du restaurant. En débarquant sur les lieux avec Radio Raheem et Smiley (Roger Guenveur Smith), la rage des trois hommes face au refus de Sal (Danny Aiello) d’accepter que leurs appels à l’inclusion et à la représentation tombent dans l’oreille d’un sourd et d’un dédaigneux est palpable et déclenche une chaîne d’événements qui aboutissent à un chaos total. Cette colère s’empare également de Mookie et de ses voisins, qui ajoutent à l’hostilité en provoquant une émeute et en appelant à la damnation et à la destruction de la pizzeria et de son propriétaire. Ces sentiments profonds de ressentiment se sont manifestés à d’innombrables reprises, notamment lors des émeutes de Los Angeles en 1992 et de Ferguson, dans le Missouri, en 2014.

10. Les dures réalités des brutalités policières
Si l’oppression des forces de l’ordre à l’égard des minorités existe depuis des siècles, les brutalités policières sont devenues un sujet brûlant dans les années 80, lorsque divers créateurs issus des communautés noire et latino ont abordé la question par le biais de leur art. Le meurtre de Radio Raheem aux mains de la police est devenu l’un des moments les plus tragiques du cinéma moderne et a fait prendre conscience de la fracture entre les forces de l’ordre et les communautés urbaines. Cependant, il reflète également le peu de changements intervenus, puisque de jeunes hommes noirs continuent d’être tués de sang-froid sans motif valable, et que les policiers impliqués continuent d’éviter de payer pleinement le prix de leurs actions dans de nombreux cas.Vibe

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 Public Enemy– Fight The Power 5:29
Teddy Riley Feat. Guy– My Fantasy 4:56
E.U.– Party Hearty 4:40
Steel Pulse– Can’t Stand It 5:03
Perri– Prove To Me 5:22
Perri– Feel So Good 5:38
Take 6– Don’t Shoot Me 4:06
Lori Perry And Gerald Alston– Hard To Say 3:20
Keith John– Why Don´t We Try 3:32
Al Jarreau– Never Explain Love 5:56
Ruben Blades– Tu Y Yo 5:12
Take 6– We Love (Jingle)

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