
.CRITIQUE/
« Quel est le meilleur agent de publicité ? »
Gainsbourg répond à un journaliste : « Sans conteste, le Vatican ».
Enregistré en 1969 avec Brigitte Bardot, qui avait demandé à Gainsbourg de lui écrire « la plus belle chanson d’amour qu’il puisse imaginer », le sulfureux » Je t’aime moi non plus » sera retiré très rapidement des ondes sous la pression du nouveau mari de Brigitte Bardot : Gunthers Sachs. Elle acceptera sa sortie en 1986 en demandant que les droits soient reversés à une association en faveur de la protection des animaux.
En 1969, il l’enregistre de nouveau avec Jane Birkin : cette version devient numéro 1 en Angleterre, mais est interdite de diffusion dans beaucoup de pays.
En 1976, Gainsbourg sort » Je t’aime, moi non plus » son premier film, dont la bande-son comporte ce titre et un sublime morceau » Ballade de Johnny-Jane « .
Chaud devant ! Ocollus
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Je t’aime… moi non plus est une chanson française écrite et composée par Serge Gainsbourg, et chantée par celui-ci, en duo, tout d’abord avec Brigitte Bardot en 1967, qui refuse dans un premier temps sa publication. Gainsbourg la réenregistre donc avec sa nouvelle compagne Jane Birkin en 1969, et le titre sera notamment n°1 au Royaume-Uni.
Historique
En 1966, Serge Gainsbourg compose la musique de la scène de bal pour le film Les Cœurs verts réalisé par Edouard Luntz. Lorsque fin 1967, Brigitte Bardot demande à Serge de lui écrire « la plus belle chanson d’amour qu’il puisse imaginer ». Sur cette musique, il pose les paroles de Je t’aime… moi non plus. En une seule nuit les duos Je t’aime… moi non plus et Bonnie and Clyde sont achevés.
Brigitte Bardot en 1967, alors mariée avec Gunther Sachs, en Italie.
L’orchestre est enregistré à Londres puis les voix du duo au studio B des studios Barclay, avenue Hoche à Paris. L’enregistrement est diffusé le lendemain à 12 h 30 sur Europe 1.
Le scandale éclate : Gunter Sachs, homme d’affaires allemand et mari de Bardot, menace immédiatement de poursuites en justice. Il n’y aura pas d’autre diffusion à la radio, le disque ne sortira pas et telle est la rupture sentimentale.
En 1968, Serge Gainsbourg tourne avec Jane Birkin, une jeune actrice britannique, dans le film Slogan. Une nouvelle histoire d’amour commence. Gainsbourg, frustré de l’interdiction de l’enregistrement précédent, demande à Birkin d’interpréter la chanson avec lui. Elle va la chanter une octave plus haut que Bardot, ce qui, « mêlé aux soupirs explicites et à la voix grave de Gainsbourg, donne au morceau une teinte d’innocence dévoyée et renforce le trouble ressenti par l’auditeur ».
L’orchestre est enregistré à Londres, le duo est à nouveau enregistré à Paris et dans le même studio. Le disque sort en février 1969. Sur la couverture d’origine figurait la mention « Interdit aux moins de 21 ans ». La couverture est modifiée lors de la commercialisation du disque sous le label Fontana à la place de celui de Philips. En effet, la reine Juliana appelle le conseil d’administration de Philips pour lui faire part de son mécontentement quant au titre. Par la suite, il est transféré vers un plus petit label, Fontana, sans entacher son succès aux Pays-Bas.
Toutefois, Bardot, regrettant de ne pas avoir publié sa version, donne son accord en mai 1986 pour la faire publier en single, mais à condition que les profits sur les ventes du 45 tours soient reversées à des associations engagées dans la défense des animaux.
Malgré la sensibilité des deux femmes sur cette chanson, Jane Birkin et Brigitte Bardot se lieront finalement d’amitié sur le tournage du film Don Juan 73, réalisé par Roger Vadim.
Accueil de la version Gainsbourg-Birkin
Lorsque le titre sort en 1969, un journaliste demande : « Quel est le meilleur agent de publicité ? », Gainsbourg répond : « Sans conteste le Vatican ».
L’Osservatore Romano qualifie d’obscène la chanson ; à la suite de cela les radios italiennes l’interdisent sur leurs ondes le 25 août 1969, puis les suédoises le 10 septembre et, enfin, les espagnoles le 13 septembre. La maison de disques Philips bloque les stocks et met aux enchères les matrices du disque alors troisième au hit-parade anglais pour être finalement retiré de la vente. Gainsbourg a conclu un accord avec le label Major Minor Records (en), qui a acquis les droits de la chanson pour le ressortir en single au Royaume-Uni, ce qui permet à la chanson d’atteindre la première place, devenant le premier single banni et en langue étrangère à atteindre la première place des charts britanniques.
Le single est interdit à la vente dans certains pays, tandis que la maison de disques de Gainsbourg, Philips, préfère remplacer le titre sur l’album dont il est extrait par La Chanson de Slogan. Officiellement rendu à son auteur, Gainsbourg en confie l’exploitation à Disc AZ.
L’objet du scandale : « un duo en râles mineurs ». Jane Birkin n’aurait que vingt ans (donc mineure), selon un article publié en 1969 dans les colonnes de L’Express (republié en 2011 sur le site lexpress.fr). Très choqué, le quotidien Il Giornale d’Italia écrit dans ses colonnes : « En l’espace de trois ou quatre minutes, Gainsbourg et Jane Birkin émettent autant de soupirs, de plaintes et de grognements qu’un troupeau d’éléphants en train de s’accoupler ». De plus, la presse y voit une apologie de la sodomie (« Je vais je vais et je viens / Entre tes reins »). Ce qui n’entrave pas le succès de la chanson dont les ventes dépassent les 750 000 exemplaires. En comparaison, la version de Bardot, sortie dix-sept ans plus tard, ne rencontre qu’un succès commercial modeste (20 000 exemplaires vendus).
Hommage de Brigitte Bardot à la mort de Jane Birkin
Le 16 juillet 2023, jour où est rendu publique la mort de Jane Birkin, Brigitte Bardot fait allusion à la chanson et écrit : « Dimanche 16 juillet, bien triste ! J’ai un gros chagrin, Jane est partie. Quand on est aussi jolie, aussi fraîche, aussi spontanée, avec une voix d’enfant, on n’a pas le droit de mourir. Elle reste éternelle dans nos coeurs. Elle a fui la gadoue, la gadoue qui ravage sa seconde patrie et nous chuchotte Je t’aime. Nous non plus, lui répond ce qui reste de la France » ».
Autour de la chanson
En Italie, pour évoquer la sodomie, les italiens parlent « d’amour à la Gainsbourg ».
Le duo Bourvil / Jacqueline Maillan a enregistré, en 1970, une parodie : Ça (Je t’aime… moi non plus), paroles Serge Gainsbourg / Marcel Mithois et musique de Serge Gainsbourg. Le 45 tours, paru deux mois avant le décès de Bourvil, se vend à 70 000 exemplaires.
Je t’aime moi non plus est également le titre d’un film réalisé en 1976 par Serge Gainsbourg et interprété par Jane Birkin et Joe Dallesandro.
Dans la version de Brian Molko et Asia Argento en 2003, les paroles habituellement chantées par l’homme le sont par la femme et inversement.
L’idée du titre vient d’une phrase de l’artiste Salvador Dalí à qui on demandait ce qui le différenciait de Picasso. Il répondit « Picasso est espagnol, moi aussi. Picasso est un génie, moi aussi. Picasso est communiste, moi non plus. »
Le riff d’orgue répété en boucle a probablement été inspiré par celui de la chanson A Whiter Shade of Pale du groupe Procol Harum sortie en 1967, lui-même inspiré par un morceau de Bach.
La chanson des Charlots, Sois érotique, est également inspirée de cette chanson dont elle reprend le rythme et détourne l’orchestration.
La chanson est utilisée dans le film 14 ans, premier amour (14+) du réalisateur russe Andrei Zaitsev.
Ballade De Johnny-Jane 3:08
Le Camion Jaune 0:51
Banjo Au Bord Du Styx 2:00
Rock’N’Roll Autour De Johnny 1:30
L’Abominable Strip-Tease 1:48
Joe Banjo 3:29
Je T’Aime Moi Non Plus 3:19
Je T’Aime Moi Non Plus Au Lac Vert 2:10
Je T’Aime Moi Non Plus Au Motel 2:29
Ballade De Johnny-Jane – Final 5:27
