Chet Baker – Sings and Plays from the Film « Let’s Get Lost »

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16 avril 2017 par OC


  • CRITIQUE/

J’ai eu la chance de voir Chet Baker en concert, un an avant le début du tournage de ce documentaire en 1986, enfin, ai-je vraiment eu de la chance ?

Après avoir laissé son groupe jouer 3 morceaux sans lui, Chet Baker nous annonce qu’il ne jouera pas de trompette ce soir-là, un bouton de fièvre sur la lèvre l’en empêchant. Il chantera donc 5 morceaux et partira comme un voleur, c’est le souvenir triste et pathétique que je retiens du trompettiste qui fit trembler Miles Davis.

« Let’s get lost » est un film dérangeant, mettant en scène l’un des plus grands trompettistes de l’histoire du jazz. Ce beau gosse notoire est filmé sur la fin de sa vie, dans le tourbillon de la déchéance absolue. Il mourra avant la fin du documentaire d’ailleurs, ce qui fit couler un peu d’encre sur le caractère voyeuriste du documentaire.

Ce disque est une merveille de sensibilité, le 1er morceau « Moon and sand » est prodigieux, suivi par le non moins magnifique « Imagination ». Chet est au paroxysme de son art faisant même oublier le « son » pas très sexy  de la basse électrique.

Quand Chet Baker chante ici, le temps s’arrête en nous ramenant à l’essentiel. Cet ange déchu s’est laissé brûler les ailes par l’héroïne, en se mettant une dernière fois à nu. Magistral !  Ocollus

Cliquez pour écouter (ci-dessous)

Full album……

le film…..


« C’était il y a 20 ans, un 29 mars, je fêtais mon anniversaire. On venait de terminer Let’s Get Lost et on découvrait le montage final, un soir de nuit pluvieuse. Plus tôt dans l’après-midi, j’étais sur le toit de l’appartement d’Alan Ginsberg pour faire son portrait. Je lui racontais les grands moments passés à faire ce film. Il m’a demandé quand j’avais parlé à Chet pour la dernière fois. C’était au téléphone, de l’aéroport d’où il m’appelait en PCV, pour se rendre à Amsterdam. Bien sûr, j’ai accepté la communication. Il semblait déprimé. Il m’a demandé si tout le monde allait bien et comment avançait le film. Il m’a dit qu’il était fatigué et qu’il passait le bonjour à Nan. Je lui ai répondu que nous avions presque terminé, et que Nan avait toujours cru en son histoire de costume perdu lors d’un voyage en Europe. Moi je pensais qu’il l’avait échangé contre de l’argent car il en avait toujours besoin. Il a ri, et je lui ai dit qu’Agnès B. en avait déjà refait un à l’identique de celui qu’il portait dans le film. Agnès et Nan croyaient en cette histoire de costume perdu. Je suppose que toutes les femmes de sa vie ont dû croire à ses histoires. Chet n’a pu se rendre à la première du film au Festival de Venise. Il est mort à Amsterdam le 13 mai 1988. Sa musique passe maintenant sur toutes les radios de jazz, et chaque acteur rêve d’incarner Chet Baker à l’écran. Les gens s’approprient son style, copient ses vêtements, sa coiffure à ses débuts en Californie. Mais que reste-t-il de toutes ces années ? Ses derniers enregistrements qui n’auront jamais eu lieu et que nous avions tant espéré et les souvenirs, avec lui, sur la plage en plein vent. On faisait du cerf-volant et on était heureux. Maintenant, sans Chet, c’est un peu “You Don’t Know What Love Is Until You Know The Meaning Of The Blues ». Bruce Weber

Bruce Weber revient sur Let’s get Lost
 Entretien pour le journal Première (2008)

« Pas un documentaire sur sa musique mais sur son attitude » Perdu depuis 14 ans, «Let’s Get Lost», documentaire iconique sur Chet Baker refait surface à Cannes par Alex Masson.

« Let’s get lost » a défini l’image iconique de Chet. Vous vouliez le filmer comme une rock star ?
Je ne sais pas si c’est une rock star. C’était un mec unique, un bad boy avec une gueule d’ange. Chet avait une façon de bouger, de parler, de vivre, qui étaient inimitables. « Let’s get Lost » n’est pas un docu sur sa musique, c’est un docu sur son attitude. L’art est le produit de ta personnalité ; tu joues ce que tu es. J’ai fait ce film parce que j’aime sa musique, mais je ne voulais pas filmer Chet chanter des chansons ou jouer de la trompette. Je voulais capturer son essence.

Vous voulez dire les filles, la drogue, les décapotables ? Dans le film, on a l’impression de voir un spectre pasolinien, un james Dean cramé…
Sa vie est une telle aventure… La beauté cotoie le sordide. Vivre à ses côtés fut une expérience de dingue. Je l’ai accompagné dans des concerts, dans des bars pourris, dans ses chambres d’hôtels miteuses, à côté des terminus Greyhounds. Une pièce nue, du papier peint décrépit… C’était une ambiance de Dolce Vita éventée, avec au milieu de tout ça, Chet qui était là comme au Ritz…

C’était cool de traîner avec lui ?
Non : c’était pas cool. C’était drôle, bizarre, touchant, étrange, mais pas cool. Le tournage ressemblait un peu à ces films de vacances où les gamins font toutes sortes de conneries. Chet était comme un enfant, il fallait veiller sur lui, l’encadrer et le rassurer.

Comment est née l’idée du film ?
Je cherchais à le photographier depuis des années. Mais à cause de ses problèmes de drogue, il n’avait pas mis les pieds sur le sol américain depuis des lustres. Et puis un jour, j’ai appris qu’il était à New York. Je suis parti avec mon chef op et une caméra. Sans trop savoir où on allait. Au début on devait juste passer quelques heures avec lui, le suivre dans son appartement d’Harlem. On a filmé 6 minutes je crois et j’étais content d’avoir un joli portrait de Chet. Mais quand je me suis assis face aux rushes, quand j’ai vu les images, je me suis dit qu’il fallait aller plus loin. Il était aussi beau que dans sa jeunesse.

La mort de Chet pendant le montage a dû tout bouleverser…
Je ne savais pas si j’allais pouvoir continuer. J’étais dévasté. On a alors fait un truc bizarre. On s’est allongé. Doucement. Le monteur, le chef op, les producteurs. On s’est tous étendus par terre et on s’est recueillis. A un moment, j’ai dit : « on se revoit dans deux semaines ». Pendant 15 jours, on a réfléchi au film, à la dette qu’on avait envers lui et quand on s’est réunis, on a décidé de tout reprendre. C’est comme si on avait entendu son appel. Là-haut, je suis sûr qu’il nous écoute.

CHET BAKER

Chet Baker est un trompettiste (1929-1988) bugliste et chanteur de jazz. Sa discographie est immense (+ de 200 disques) il joue avec Russ Freeman, Rassinfosse, Philip Catherine… il enregistre (souvent en sudio) à partir de 1952 et ce, jusqu’en 1988 aux côtés de musiciens comme Gerry Mulligan, Bud Shank, Stan Getz, Joe Pass, Ron Carter, Bill Evans, Art Pepper…
Trois périodes dans la production de Chet Baker (sources de Jean-Claude Zylberstein mai-juin 2001, publié à la fin de Comme si j’avais des ailes de Chet Baker) :
1952-1956 : l’âge d’or du trompettiste. Il enregistre avec Gerry Mulligan en quartette (EMI/Pacific Jazz) ces disques font partie des must du jazz moderne, de cette période du Cool Jazz de la Côte Ouest. Également des séances d’enregistrements avec le pianiste Russ Freeman. Il enregistre aussi en 1955 à Paris pour Barcley (The complete 1955-1956 Barclay Sessions, coffret 8 cd). Deux disques avec Art Pepper The Route et Playboys (EMI).
1957-1970 : passage à l’Est.  Chet Baker in New York, The Lyrical Trumpet Of Chet Baker et Chet Baker Sings It Could Happen to You (Riverside) aux côtés de Johnny Griffin, Bill Evans, Al Haig ou Philly Joe Jones. Un album hommage à Bilie Holiday Baker’s Holiday (aujourd’hui sur Verve) et les séances-marathons des 23,25 et 29 août 1965 (sur Prestige/Fantasy).
1970-1988 : La période surtout européenne. Beaucoup de références incontournables. Citons She Was Too Good to Me avec Paul Desmond, Once upon a Summertime. There Will Never Be Another You avec Philip Catherine.
Le bassiste Riccardo del Fra, qui a longtemps joué avec Chet, explique, dans le livre de Gérard Rouy consacré à Chet Baker, sa conception particulière de la musique :
« Je sentais chez lui une profondeur qui me bouleversait, j’ai aussi appris avec lui le contrôle de soi-même : c’est-à-dire essayer de faire l’essentiel. La perfection, on le sait, n’existe pas. Mais lui, quand il joue, il en est très proche. Et quand on joue avec lui, il faut vraiment servir la musique et se libérer de son ego. Disons que sa virtuosité est plus magique que technique. »

BRUCE WEBER

Bruce Weber (né en 1946) est un photographe américain très connu pour ses campagnes de publicité pour les marques de vêtements Calvin Klein, Abercrombie & Fitch et Ralph Lauren. Il est également cinéaste et réalise Broken Noses en 1987 film sur de jeunes boxeurs et Let’s Get Lost en 1988 sur la vie du célèbre trompettiste Chet Baker. En 2001, il réalise un film intitulé Chop Suey Club. Filmé en noir et blanc, ce film documentaire traite à la fois du lutteur Peter Johnson, ainsi que de la carrière et des sources d’inspiration de Weber. En 2004, il réalise le documentaire contre la guerre A Letter to True.

Bruce Weber s’intéresse à Chet Baker lorsqu’il découvre une photo du musicien dans un magasin de disque de Pittsburgh sur la couverture du vinyle 33T Chet Baker sings and plays with Bud Shank, Russ Freeman and Strings (Pacific Jazz, 1955). Weber rencontre Chet un hiver de 1986 dans un club Newyorkais. Il le convainc de prendre une photo de lui ce qui allait être à l’origine d’un film court de 3 minutes. Weber a voulu faire un film court sur la chanson d’Oscar Levant intitulé : Blame It On My Mouth.

Ils passent de bons moments ensemble et Chet prend confiance en Weber. Puis Weber lui propose de réaliser un film plus long, il accepte.

Le tournage commence en janvier 1987. « Les interviews avec Chet étaient un défi, se souvient Bruce Weber. Parfois nous devions nous arrêter pour plusieurs raisons et aussi parce que Chet Baker était un drogué et ne pouvait pas faire deux choses à la fois. Nous devions recommencer encore et encore. »

Dans ce film, on peut mentionner l’apparition de plusieurs photographies de Chet prises par William Claxton (célèbre photographe américain) dans les années 50, photos qui ont participé à la représentation du personnage, un James Dean de la musique, une gueule d’ange qui se noiera dans la drogue.
En mai 1987, le documentaire de Weber Broken Noses est projeté au Festival de Cannes. Il en profite pour amener Chet Baker pour le filmer pour Let’s Get Lost. Pour faire ce film, Weber a dépensé 1 million de dollars de son propre argent. Il filmait Chet Baker quand il avait le temps et l’argent, décrivant ce film comme un film très ad hoc. Le titre du film vient d’une chanson chantée et jouée par Chet Baker  (titre qui figure sur ce fameux disque trouvé chez un disquaire par Bruce Weber).

Le documentaire a été plutôt bien reçu par la critique. Il a été nominé pour les Académy Awards dans la catégorie du « Meilleur film documentaire » en 1988 et au Festival de cinéma américain de Deauville en 1989 dans la catégorie « Coup de cœur ». Sorti en France le 7 février 1990, il ressort en copie restaurée le 23 juillet 2008 dans quelques salles françaises. Sur Lyon, seul le cinéma CNP Odéon (maintenant fermé) l’a programmé. On peut espérer revoir le film sur grand écran dans des festivals comme Fort en Jazz à Francheville (69) en 2006 où une soirée était intitulée : « Nuit jazz et cinéma, around Chet Baker ». On pouvait revoir ou découvrir sur grand écran Chet’s Romance court métrage de Bertrand Fèvre, Let’s Get Lost et The Connection (1962), film américain réalisé par Shirley Clarke qui suit les pas d’un jeune réalisateur tournant un film avec des musiciens et artistes drogués qui attendent chacun leur dealer, et qui se trouve être la même et unique personne formant donc une connexion entre tous. Ou encore la soirée Jazz et cinéma dans le cadre du Hot Club Jazz Festival au cinéma Comoedia à Lyon en mai 2011 où l’on peut revoir Let’s Get Lost en copie restaurée et découvrir le premier film documentaire d’Emilie Souillot intitulé Histoire(s) de Jazz : le Hot club de Lyon (52 minutes). Ce premier film de la réalisatrice s’attache aux petites histoires de jazz qui ont rendu ce lieu mythique, histoires racontées par ceux encore présent qui ont connu les années 50,60,70 du Hot club de Lyon. On apprend que Chet Baker devait venir jouer à l’auditorium de Lyon et qu’il n’est jamais venu. Il revient quelque temps plus tard à l’improviste pour jouer au Hot Club (et se faire pardonner). Il restera plusieurs jours laissant derrière lui d’incroyables souvenirs pour ceux qui étaient présents.
 Sources : trad. Emilie Souillot .Wikipédia.

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1 Moon and Sand
2 Imagination
3 You’re My Thrill
4 For Heaven’s Sake
5 Everytime We Say Goodbye
6 I Don’t Stand a Ghost of a Chance With You
7 Daydream
8 Zingaro A/K/A Portrait In Black & White
9 Blame It on My Youth
10 My One and Only Love
11 Everything Happens To Me
12 AlmostBlue

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